Il a 75ans, si mes calculs sont bons, on signait la paix et on fêtait la liberté. Le parallèle est brutal. Mais aujourd’hui, après ces 2 mois, ces 9 semaines, ces 53 jours de confinement, je ne peux m’empêcher de célébrer ces deux victoires.
Deux victoires qui n’en sont pas.
Papi me le rappelle, il a survécu à la guerre, il a survécu au krash pétrolier, il a survécu au terrorisme, alors pour lui, un virus, rester chez soi, profiter autrement, vivre autrement, ce n’est rien. Républicain, il le fait avec son sens du devoir et son civisme. Pour se protéger, pour nous protéger, et en soutien avec tout ceux qui n’ont pas d’autres choix. Comme moi, comme nous tous.
On n’a pas vraiment gagné la deuxième guerre, des milliers de gens sont partis. Et on n’a pas vraiment gagné la bataille contre cette maladie, parce qu’elle est toujours là, parce que des gens nous ont quittés et parce que nous allons encore devoir composer et changer ces petites habitudes qui nous étaient chères.
Le changement d’habitude.
J’ai besoin d’habitude. Apparemment, c’est normal et surtout avec la pathologie que je me suis auto-étiquetée : hypersensible. Alors, pendant ce confinement, j’ai eu besoin d’un album chouchou, j’ai eu besoin de garder mes horaires de sommeil, mes horaires de travail, d’appeler mes copains les jours où d’habitude je les vois, de garder mes samedis pour moi, de bien manger, d’être contente, de me laisser bercer par mes humeurs, par mes hormones, par mes envies corporelles.
J’ai essayé d’ajouter des routines, adieu le vélo alors bonjour le yoga et la marche rapide, les tutos workout… J’ai tenu deux semaines. Mais j’ai ajouté les appels encore plus fréquents pour Papi, j’ai forcé le gros Laulau à me parler régulièrement, j’ai mis des vêtements que je ne portais plus, j’ai cuisiné des nouvelles choses et surtout, je me suis surprise à aimer.
Aimer au temps du confinement.
Peu avant le confinement, quelqu’un s’est immiscé dans ma vie, sans trop vraiment que je comprenne, comme les mulots dans mon appartement. Se découvrir par messages, là où normalement tu te découvres par le corps, a changé énormément le rapport de la relation, le rapport à l’autre.
Et puis, il y a eu les 24 ans.
Cette dernière année avait été compliquée. La veille de mes 23 ans, je m’étais promis certaines choses. Les mois qui ont suivi, ont été compliqués, lourds, extrêmement difficiles. La dépression m’a guettée. En septembre, j’ai eu carte blanche. En octobre, j’ai repris possession de ma vie, de mon corps et de mes envies. J’ai enfin accepté que Romain n’était pas l’homme de ma vie. J’ai accepté que mon corps aurait toujours cette grosse poitrine et ce peu de fesses. J’ai accepté que mon visage ne serait jamais celui que je veux. J’ai accepté que cette tâche pousserait toute ma vie. J’ai accepté ma passion pour le marketing digital. J’ai accepté qu’il était contraire à toutes mes valeurs. J’ai accepté et j’ai tout fait pour embrasser ce que je rejetais jusque-là.
Agréablement surprise que oui, je me suis écoutée : « Comme on part sur les conseils : écoute ton coeur, vraiment. Cette fois, tu t’es forcée à partir, alors que t’en avais peu envie. Alors arrête. Si tu ne veux pas, ne fais pas. Vraiment, s’il-te-plaît. Trouve-toi une passion, un truc qui te donne envie de te lever le matin, et je ne te parle pas de Netflix. Trouve-toi un vrai truc. Fais du vélo, cours, théâtre. mais fais quelque chose qui t’emplit de bonheur, s’il-te-plait. Trouve-toi une alternance pepouz. Mets-toi en colocation avec tes potes. Postule à l’autre Master. »
Le bilan
Ce n’est pas insurmontable. Ce n’est pas agréable. Mais tu ne peux pas le contrôler, alors fais ce que tu peux.